Dans les terres du Congo, le mystique est un fil invisible qui traverse les âges, liant le passé et le présent d’une manière que peu osent questionner. Depuis toujours, les récits d’esprits, de sorcellerie, de malédictions et de miracles ont imprégné le quotidien des gens, qu’ils vivent dans des villages reculés ou dans les rues animées des grandes villes. Mais aujourd’hui, quelque chose a changé. Le mystique, autrefois omniprésent, semble flotter dans une zone d’ombre, un espace flou entre croyance et scepticisme. Pour notre génération, bercée par la modernité et le scepticisme, cet univers apparaît à la fois fascinant et insaisissable.
Pour nos ancêtres, le mystique n’était pas une question de choix ou de foi, mais une évidence. La vie était perçue comme un équilibre entre le visible et l’invisible, entre le tangible et l’intangible. Chaque événement portait une signification spirituelle. Une récolte dévastée par la sécheresse n’était pas simplement le fait du climat, mais une manifestation de la colère des ancêtres ou d’un esprit négligé. Une maladie mystérieuse chez un enfant ne relevait pas de la médecine moderne mais souvent d’un envoûtement, d’un mauvais œil. Les esprits, les sorciers et les forces mystiques faisaient partie intégrante de la vie quotidienne.
Dans les villages, les anciens racontaient ces histoires avec une autorité incontestée. Ils étaient les gardiens du savoir, les médiateurs entre le monde visible et l’invisible. Chaque récit, chaque rituel, portait un enseignement, une manière de comprendre et de respecter les forces qui échappaient à la vue. Le mystique, dans cette vision, n’était pas un fardeau. C’était un guide, une boussole morale et spirituelle.
Mais aujourd’hui, ce savoir semble s’effacer, emporté par les vents du modernisme et les lumières éblouissantes de la science et de la technologie. Nos villes, avec leur bourdonnement constant et leurs écrans lumineux, ont peu de place pour les murmures des ancêtres. Les jeunes grandissent avec des smartphones à la main et des réponses instantanées sur Google. Le mystique, pour eux, appartient souvent à un passé qu’ils n’ont pas vécu et qu’ils comprennent mal. Les récits de sorcellerie et de forces invisibles sont relégués au rang de légendes ou d’exagérations.
Et pourtant, le mystique n’a pas disparu. Il est là, tapi dans les ombres, prêt à surgir dans des moments inattendus. Une femme dans un village qui affirme avoir été visitée par un esprit dans un rêve. Un homme qui raconte avoir vu un enfant disparaître mystérieusement dans les bois. Une famille qui organise une cérémonie pour "lever une malédiction" après une série de malheurs inexpliqués. Ces histoires persistent, même dans les espaces les plus modernes, rappelant que l’invisible n’est jamais loin.
Mais pour notre génération, ces récits soulèvent plus de questions que de réponses. Pourquoi continuons-nous d’accorder une place au mystique dans un monde dominé par la science et la logique ? Est-ce simplement une peur de l’inconnu, une incapacité à accepter le hasard ? Ou y a-t-il quelque chose de plus profond, une vérité que nous avons perdue de vue dans notre quête de modernité ?
Il y a aussi un autre défi : la transmission. Les anciens, qui détenaient autrefois les clés de ces connaissances, sont de plus en plus silencieux. Peut-être est-ce parce qu’ils sentent que leur savoir n’est plus le bienvenu dans un monde où tout doit être prouvé et quantifié. Ou peut-être est-ce simplement parce que les jeunes ne posent plus les questions qu’il faudrait poser. Les rites initiatiques, les cérémonies et les récits oraux qui permettaient autrefois de transmettre ces savoirs se raréfient. Ce silence crée un vide, une zone d’incertitude où le mystique devient flou, méconnu, et parfois méprisé.
Pourtant, tout le monde n’a pas tourné le dos à cet univers. Il existe encore des jeunes qui, face à des expériences inexplicables, se tournent vers le mystique pour trouver des réponses. Ils ne le font pas toujours par foi, mais souvent par nécessité. Quand la logique échoue à expliquer une série de malheurs ou un événement étrange, le mystique redevient une option, une lueur dans l’obscurité. Ce retour au mystique n’est pas toujours assumé, mais il est là, discret, persistant.
D’autres, cependant, rejettent fermement ces croyances. Pour eux, le mystique est un fardeau, une relique d’un passé qui entrave le progrès. Ils pointent du doigt les abus qui peuvent accompagner ces croyances : les accusations injustes de sorcellerie, les "guérisseurs" frauduleux, les familles brisées par des conflits liés à des malédictions présumées. Pour ces sceptiques, abandonner le mystique est une condition nécessaire pour avancer, pour construire une société où les décisions sont guidées par la raison plutôt que par la peur.
Mais est-ce vraiment si simple ? Abandonner le mystique, c’est aussi abandonner une partie de notre identité culturelle. Ces récits, qu’ils soient réels ou non, portent en eux des leçons, des valeurs, une vision du monde qui a façonné des générations. Peut-être que la solution n’est pas de choisir entre le mystique et la modernité, mais de trouver un équilibre, une manière de réconcilier ces deux mondes.
Nous, la génération du numérique, avons encore un rôle à jouer. Nous pouvons poser des questions, écouter les récits des anciens, explorer cet univers avec curiosité et respect. Nous n’avons pas besoin de tout accepter comme une vérité absolue, mais nous ne devons pas non plus tout rejeter sans chercher à comprendre.
Le mystique, au-delà des croyances et des superstitions, est une fenêtre sur ce que signifie être humain. Il nous rappelle que, malgré tout notre savoir et notre technologie, il y a encore des choses que nous ne comprenons pas. Il nous invite à être humbles, à reconnaître que le monde est vaste, complexe, et qu’il reste des mystères à explorer.
Alors, à ceux qui se sentent attirés par cet univers : j'aurais de la difficulté a vous dire plongez-y, mais si vous le faites, agissez avec une curiosité sincère et un esprit critique. Et à ceux qui le rejettent : souvenez-vous que chaque histoire, chaque croyance, a quelque chose à nous apprendre, même si ce n’est pas ce que nous attendions. Le mystique n’est pas seulement un écho du passé ; c’est une partie de nous, une pièce du puzzle de notre humanité. Et peut-être, en explorant cet univers, trouverons-nous des réponses non seulement sur le monde qui nous entoure, mais aussi sur nous-mêmes.
Et vous, quel est votre avis sur cet univers ?
Cedric Lamini
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